Sur le devant de la scène

24.09.2021 - Regard d'expert

L’ouverture s’annonce grandiose. La première est fixée au 10 avril 2022. Les plus grands sont attendus pour cette symphonie jaillissante et bouillonnante dans un décor des plus fastueux. Pourtant, la symphonie se fait par­fois bien peu mélodieuse, chacun jouant de sa partition. Ils l’attendent avec grande hâte, s’empressant d’obser­ver l’affiche et le nom du chef d’orchestre. La présiden­tielle s’apparente à un refrain murmuré depuis de longs mois. Quelle distribution ? Nous y approchons. Respon­sables politiques dotés de très grandes responsabilités, ils veulent en être et sont nombreux. Alors, ils font en sorte de se montrer les plus virtuoses. Les vacances esti­vales ont, de fait, été l’occasion d’apparaître et d’être en représentation. Ces protagonistes essaient de se mon­trer à leur avantage ; pour rassurer, tisser un lien et commencer à entonner leur propre refrain. Ils tendent alors à lever le rideau sur leur ambition pour la France.

Et ensuite

Il y a ces ténors connus à l’avance. Comme si l’acte III était déjà écrit, telle une évidence. Depuis toujours, ils ont été préparés à habiter le costume, à endosser un rôle de ténor. Parce qu’inscrits dans le sérail et parce qu’ils sont issus des plus grandes compagnies, leur voie s’annonce tracée. Ils ont découvert leurs premières notes au Met ou à la Scala. La Colline sacrée, n’est, en aucun cas, une parfaite inconnue. Et pourtant. Se détache aussi, au fur et à mesure des repré­sentations, ce second rôle ou ce jeune premier. Une voix ample s’élève dans le choeur. Elle est singulière, différente. On la retient, on décèle un talent. On n’oublie pas cette manière de jouer, d’être et de se révéler. On se dit qu’il se peut que ce soit demain une figure du répertoire. Il lancera une prochaine saison. Il y a aussi celui qu’on applaudissait à Viennes, voici quelques saisons et que l’on feint de ne pas reconnaître. Parce qu’ils ne prennent plus la lumière, parce qu’ils ne répondent plus aux grilles de lecture, parce que le tiède ou l’attendu ne leur sied pas, ils apparaissent comme à l’écart du cirque médiatique. Pour autant, ces figurants ou ces seconds rôles ont aussi leur place sur leur devant de la scène. Parce qu’ils se retrouvent un temps dans l’ombre, on les fige comme oubliés. Du Canada, du désert, de Fie­sole ou d’ailleurs, l’Histoire l’a montrée ; ils peuvent reve­nir. Plus forts. Parce qu’ils ont su raconter et écrire une page de l’Europe, parce qu’ils se sont investis sur tel sujet, ils peuvent, de nouveau, s’inscrire dans l’agenda.

Un livret à réinventer

De l’acte II au suivant, des rebondissements auront lieu. Tel secrétaire général adjoint, telle conseillère spéciale, tel membre de l’entourage s’imposera en mezzo. Ne rebattons pas trop vite les cartes. De la présidentielle aux législatives, le terrain de jeu se fait grand. L’entracte, où l’on se salue et où l’on s’épie dans les plus belles salles du monde, s’avère crucial. De cette vingtaine de minutes, peuvent se nouer des destins, des parcours fascinants et des promesses d’ailleurs. Contre toute attente, des profils peuvent s’imposer et sortir de l’ombre. Aiguisons notre regard, donnons cette chance.

S’attacher à l’essentiel

Parce que le protagoniste a une densité, une perception du monde singulier, il se détache et se distingue. De ces semaines, un peu différentes de l’ordinaire et hors du par­cours attendu par ses pairs, il a appris. Le voilà comme tout autre en en sachant davantage sur lui, sur ce qui l’anime et le porte. Occasion aussi de se dévoiler et de se raconter autre­ment. De ce qui peut s’apparenter à un chemin sinueux, peut aussi être l’occasion de renforcer sa ténacité, sa volonté et de se diriger vers l’essentiel. Parce qu’il est talentueux, il cultivera ce qui le rend autre avec courage et sans faillir. Jusqu’au temps de la représentation, des saluts, tout est à créer, à inventer. L’opéra prendra vie sur scène, sur les tré­teaux ou sur le plateau, avec le public. Cessons de raconter et de figer ce dernier à coups de photographies ponctuelles, du moins avant la première. Le livret – débat, programmes, idées, visions – donnera de l’allant. Redonnons de la densité et de l’aspérité au débat. Et puis, peut-être, que d’une voix ample, on finira aussi par parler de politique. En chantant

Mathilde Aubinaud
Mathilde AUBINAUD, diplômée d’ASSAS et du CELSA en stratégie de marque branding, est communicante et plume. Après avoir été responsable des relations publiques, elle prépare les élèves aux concours de l’enseignement supérieur, elle décrypte la communication politique. Elle vient de publier son 6ème livre La Saga des Audacieux chez VA Editions.